Brandub

ou Brannumh, le Corbeau Noir





Nombre de joueurs :             2


Matériel :

–         un plateau 7×7; la case centrale et les 4 coins sont marqués ;

–         un roi et 4 princes;

–         8 attaquants.


But du jeu :

Pour le camp du Roi : faire s’échapper le Roi en lui faisant atteindre un coin.

Pour les attaquants : capturer le roi avant sa sortie


Règles :

            Au départ, le Roi est au centre, entouré de sa garde ; les attaquants sont répartis autour comme sur la fig. 1. Nous n’avons pas de précisions sur le camp qui commence. Nous proposons que les attaquants débutent.


Nous proposons d’utiliser les règles du tablut pour compléter les éléments des deux poèmes (objectif et disposition initiale), à savoir : 


Les déplacements :       Toutes les pièces se déplacent comme une tour aux échecs

(horizontalement ou verticalement du nombre de cases qu’elle souhaite sans pouvoir sauter)


La prise :          Une pièce est capturée lorsqu’elle est prise en pince par deux pièces ennemies.

Le Roi peut participer aux prises et être pris comme les autres pièces par 2 attaquants.

Mais, s’il n’a pas encore quitté la case du trône, il doit être encadré par 4 pions ennemis, orthogonalement. Si un défenseur du roi empêche l’accès du 4ème ennemi et qu’il est pris en pince entre un pion adverse et le trône, il est capturé en même temps que le roi.

Enfin, si le roi est sur une case jouxtant celle du trône, c’est qu’il l’a quitté. Le trône est hostile et il ne faut donc plus que trois ennemis pour terminer l’encerclement.


Une pièce peut se mettre entre deux adversaires sans être prise.


 

Les cases hostiles :       Seul le Roi peut stationner sur le trône. Après son départ, cette case devient hostile. Nul ne peut y pénétrer, mais elle contribue aux prises comme un pion ennemi.

Il en est de même pour les quatre cases d’angle.


Annonce des sorties : Si le roi a une sortie possible au prochain tour, il doit annoncer « une sortie », s’il en a deux, il doit annoncer « deux sorties ».


Lorsque la partie est finie, le vainqueur prend le camp des assiégés et la partie recommence.

 


Le brandub est un des hnefatafl, mais que sait-on spécifiquement de lui ?

 




Sources littéraires :


  • Dessin de la pierre d’Ockelbö, Suède, vers 1100, reconstitué d’après dessin après l’incendie de l’église (voir dans la base jocari.be).
  • Poème Abair riom a Eire ogh, attribué à Maiol Eoin Mac Raith (après 1200 ? poésie de cour de la période 1200-1650)1;
  • Poème Acallam na Senorach (fin XIIe s)2;
  • Tri Biorghaoithe an Bhais = Three Shafts of Death de Geoffrey Keating, 1631, réfère au jeu brannahm en reprenant la morale des échecs des pieces aux différentes places sur le jeu mais toutes égales une fois rangées dans le sac3 .



1)  Poème Abair riom a Eire ogh, attribué à Maiol Eoin Mac Raith

 

Le centre de la plaine de Fal est la merveilleuse colline du château de Tara ;

dehors, dans l’exact centre de la plaine,

comme une marque sur un plateau bariolé de brannumh. Allez-y, cela vous sera profitable:

sautez sur cette case, qui convient au branan,

le plateau, comme il convient, est vôtre.

Je voudrais attirer votre attention, o dents blanches,

sur les cases noble correctes pour le branan

(Tara, Cashel, Croghan, Naas, Oileach),

faîtes qu’elles soient occupées par vous.

Un branan doré  avec sa bande,

c’est vous avec vos quatre provinciaux;

vous, O roi de Bregia*, sur cette case, là-bas,

avec un homme sur chacun de vos côtés.

 

* Bregia et Teffia forment le royaume de Meath en Irlande qui comprend Tara.

On y apprend :

  •  la case centrale est la forteresse de Tara et se repère ;
  • quatre autres cases nobles correspondent aux quatre  autres royaumes d’Irlande : Cashel, Croghan, Naas, Oileach
  • Le branan, chef ou roi, doit occuper ces cases particulières
  • Le branan est entouré de quatre provinciaux, guerriers ou princes. Cette disposition particulière correspond au début de partie.

english translation

The centre of the plain of Fal is Tara’s castle, delightful hill; out in the exact centre of the plain, like a mark on a parti-coloured brannumh board. Advance thither, it will be a profitable step: leap up on that square, which is fitting for the branan, the board is fittingly thine. I would draw thy attention, o white of tooth, to the noble squares proper for the branan (Tara, Cashel, Croghan, Naas, Oileach), let them be occupied by thee. A golden branan with his band art thou with thy four provincials; thou, O king of Bregia, on yonder square and a man on each side of thee.


2) Poème Acallam na Senorach (fin XIIe s)

 

Mon fameux brandub est dans la montagne au-dessus de Leitir Bhroin, cinq homme sans voix d’argent et huit d’or rouge.


On y apprend :  un camp de 5 (le branan et quatre hommes) contre 8


 english translation
My famed brandub is in the mountain above Leitir Bhroin, five voiceless men of white silver and eight of red gold.

 

Voilà, c’est peu. Ces traces littéraires ont permis d’associer à ce jeu les éléments archéologiques suivants :



Traces archéologiques :

  • Plateau en bois,  Ballindery (Irlande), daté stylistiquement du Xe siècle, (voir dans la base Jocari.be);Les points du centre et des coins sont marqués. Ce plateau correspond à la description du brandub.Le plateau comporte 7 x 7 trous et des poignées qui dépassent du jeu.Sur ces trous ont pu être utilisés des pions à cheville4 .Le rôle des protubérances n’est pas élucidé. Ont-elles pu servir à maintenir le jeu, notamment à bord d’une embarcation ou sur leurs genoux ? La pierre d’Ockelbö montre une scène de jeu sur les genoux et les sagas mentionnent des disputes au sujet du jeu qui causaient des sursauts chez les joueurs, sautant sur leur pieds, renversant l’échiquier et dispersant les pièces.
  • Plateau en chêne, Waterford (Irlande), vers 1150, (voir sur le musée virtuel irlandais, voir la fiche jocari.be associée);On retrouve les protubérances et l’épaisseur du cadre.Il est l’équivalent archéologique de celui de Ballinderry, dans un moins bon état de conservation.
  • Plateau recto-verso sur un bloc d’ardoise, Downpatrick (Irlande), dans un remblai du XIIe (voir avec l’article de Mark Hall sur le site du Down County Museum);Face visible sur la photo : 160 x 130 mm, quadrillage 6×6 qui forme un réseau de 7×7 intersections. Le rond irrégulier au centre entoure une intersection et indique que l’on devait jouer sur ces dernières plutôt que sur les cases. Chaque intersection de coin est marquée d’un secteur arrondi.Autre face : 8×8 cases peu lisible, 113×110 mm, centre marqué d’une croix, rien dans les coins
  • 2 autres plateaux gravés dans la pierre ont été retrouvés dans les Orkneys avec un quadrillage de 7×7 intersections et l’intersection centrale cerclée, mais ne comportent aucun marquages dans les coins (voir dans la base jocari.be).

Bibliographie :

  • BARBET-MASSIN Dominique, L’enluminure et le sacré. Irlande et Grande-Bretagne, VIIe-VIIIe siècles, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2013, thèse sur la symbolique de l’espace clos notamment dans les jeux de Fidchell et Alea-evangelii,
  • BREYER Catherine, JONQUAY Sylvestre, La famille du hnefatafl, Semblables et différents, Revue Histoire et images médiévales, Thématique n°28, Fév-avril 2012, pp. 16-24. (pdf) Voir les compléments;
  • HALL Mark A.,  FORSYTH, K,  Roman Rules? The introduction of board games to Britain and Ireland, in Antiquity 85.330, 2011, pp 1325-1338,
  • HALL Mark,A Double-sided Hnefatafl Board from Cathedral Hill, Downpatrick, Publication en ligne du Down County Museum
  • MAC WHITE Eoin. Early Irish Board-Games, Eigse V,1946, p 25-35
  • STERCKX Claude, Les jeux de damiers celtiques. In: Annales de Bretagne. Tome 77, numéro 4, 1970. pp. 597-609. (Voir sur Persée) (consulté le 05/08/2014)

 

Fiche réalisée par l’association  Aisling-1198 ;

contact : aisling – neuf.fr

(remplacer le – par @)





Notes :

  1. MAC WHITE Eoin. Early Irish Board-Games, Eigse V,1946, p 25-35 []
  2. MAC WHITE Eoin. Early Irish Board-Games, op. cit. []
  3. MAC WHITE Eoin. Early Irish Board-Games, op. cit. []
  4. De nombreuses pièces à fiches ont été retrouvées, voir HALL Mark A., Playtime in Pictland: The Material Culture of Gaming in Early Medieval Scotland, Groam House Museum, 2008 : Rosemarkie (The Groam House Museum Academic Lecture for 2006) et les pièces de York. []

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